Des recettes de chefs testées par Gaëtan le gourmand…
Premier billet sur un restaurant étoilé, parce que ce n’est pas le tout de faire de belles recettes chez soi, c’est aussi sympa d’y gouter directement à la source et puis au restaurant il n’y a pas que ce qui est dans l’assiette qui compte il y a aussi le cadre, le service, l’ambiance qui peuvent transformer quelques heures en instants magiques.
Il y a quelques mois j’ai testé trois recettes du chef François Admaski, une trilogie autour de la langoustine.
A l’époque de ces recettes le chef était à Bourges à l’Abbaye de Saint-Ambroix où il avait su garder l’étoile Michelin de son prédécesseur, mais depuis juillet 2009 il exerce à Bordeaux dans un tout nouveau restaurant sur la place de la Bourse, une des plus belles places de Bordeaux.
Succès fulgurant, il décroche une étoile au Michelin en mars 2010, moins d’un an après l’ouverture. En fait il n’y a rien d’étonnant, la majeur partie de l’équipe à suivi le chef de Bourges à Bordeaux.
Plantons le décor. Bordeaux, place de la bourse, bâtiments cossus au bord de la Garonne.
Ambiance romantique à souhait, sobre, très classe, superbe lustre de Murano, la seule touche de couleur avec les plats qui défileront dans les assiettes!!!
Plusieurs possibilités dont un menu du marché avec 2 verres de vin + café le midi et déjà des plats alléchants.
En bons gourmands et ayant tout notre temps nous prendrons un menu dégustation : amuse-bouche, entrée, poisson, viande, fromage, dessert, 80 €.
Le choix des plats se fait selon la carte, nous choisissons tous les deux un ris de veau croustillant à la citronnelle et laissons le choix du reste au chef face à la difficulté de choisir parmi tant de bonnes choses.
Dans bien des restaurants « gastronomiques » les enfants sont les parents pauvres du menu, voir ils n’existent même pas, une façon de vous faire comprendre qu’il serait souhaitable de les faire garder chez vous le temps du repas. Au mieux ils ont un poisson frais, des pâtes fraiches, une glace. Si vous vouliez initier le fiston aux goûts vous n’avez qu’à payer un menu adulte qui sera trop copieux et avec des goûts trop aventureux pour qu’il sache apprécier pleinement.
Au Gabriel il y a un menu enfant avec un prix raisonnable ( 25€) et les mêmes plats que le menu du marché des adultes en portions adaptées. On sent que les enfants sont les bienvenus.
Nous demandons au fiston (10 ans) s’il souhaite choisir ses plats ou laisser le chef lui faire la surprise : il opte pour la surprise!!!! Et cela en sera une, et une bonne, cela satisfera n’importe quel gourmet et pour cause, le chef a préparé le menu enfant à partir des plats de la carte :
- Amuse-bouche : taboulé de quinoa et langoustine
- Le foie gras de canard du Sud-ouest, en copeaux, fine frisée et gelée de rhubarbe croquante
- La dorade rose farcie au basilic, nougat de tomates, sauce vin blanc à l’huile des Baux
- Le chariot de fromages. Affinés chez Jean d’Alos
- Pré-dessert
- La rhubarbe, pochée, émulsion à l’orange, la cuisson givrée et sorbet yahourt
Amuse-bouche et pré-dessert aussi pour le gamin qui se régalera et ne restera pas en train de regarder ses parents déguster.
Et à part un morceau de dorade que j’ai fini, il a fait honneur à tout les plats et s’est délecté d’un roquefort fondant et fort à souhait.
Cela confirme l’impression, les enfants sont les biens venus et le chef prend plaisir à les initier à la bonne cuisine.
nous laisserons le sommelier nous conseiller. Il connaît les plats que l’on va nous servir, pas nous.
Il nous conseille un Pessac-Léognan, Chateau Latour-Martillac, blanc. Cela tombe bien j’avais envie de découvrir un blanc, j’ai de plus en plus l’impression de préférer les blancs aux rouges. Il nous explique que le goût et les impressions de ce vin évolueront au cours du repas en fonction de nos plats… je ne demande qu’à voir.
Pour commencer nous prenons un apéritif servi avec des amuse-bouches autour de la tomate:
Une tomate cerise enrobé d’une sorte de chapelure, frit, tiède. Une mini-tarte confiture de tomate, une guimauve à la tomate. Tout est bon, subtil, on passe du tiède au froid, du salé au sucré, du croquant au mou.
Texture surprenant de la guimauve à la tomate : un vrai goût de tomate avec une vrai texture de chamalow. Incroyable.
Pour les grands :
- Le foie gras de canard du Sud-ouest, en copeaux, fine frisée et gelée de rhubarbe croquante.
En fait c’est une des entrées mais en portion réduite, enfin presque!
Sublime foie gras fondant taillé en copeaux épais, salé, poivré avec il me semble du poivre de sechuan, petite frisée croquante et dés de gelée de rhubarbe dont l’acidité vive contraste avec la douceur du foie gras. Belle idée. L’association foie gras/rhubarbe est vraiment une réussite. Un brin de ciboulette et un ruban de rhubarbe sec et sucré décorent le tout.
Pour notre bout de zan de 10 ans c’est donc un taboulé de quinoa et une langoustine. Pas le temps de prendre de photo, c’est avalé sans que je ne m’en rende compte !!!!! Visiblement pas du tout à son goût!!!!
Pour nous :
- Le thon rouge, en tartare à la mangue et relevé au wasabi, servi sur un croûton
Un beau thon, une mangue, subtilement relevé au wasabi, c’est vraiment léger, palais délicat aucune crainte à avoir, le tout sur une fine tranche de pain légèrement grillée. Quelques grains de caviar d’Aquitaine.Encore une fois un mariage de saveurs et de textures réussis.
L’occasion de parler du pain présenté sous la forme de petits pains tous mignons, au levain, aux céréales, au pavot. Faits sur place ils sont tous délicieux et encore tièdes pour certains.
Coté gamin, une entrée hors-norme pour un menu enfant :
- Le foie gras de canard du Sud-ouest, en copeaux, fine frisée et gelée de rhubarbe croquante
Servi généreusement, rien à ajouter, juste à regarder.
L’assiette repartira vide, sauf pour les dés de gelée, il n’en aura mangé que quelques un pour gouter, mais c’est vrai que l’acidité n’est pas vraiment le goût préféré des enfants.
Pour les grands :
- Les cuisses de grenouilles, vivement saisies, servies sur un risotto ail et persil, les mollets en cassolette
Les cuisses de grenouilles, vivement saisies, servies sur un risotto ail et persil, les mollets en cassolette
Les cuisses de grenouilles, vivement saisies, servies sur un risotto ail et persil, les mollets en cassolette
3 cuisses de grenouilles énormes, rien à voir avec celles que j’achète chez Picard!!!!
A vrai dire je n’aurai pas choisi ce plat si je n’avais pas laissé le chef choisir. Cuisses de grenouilles, risotto, bof me disais-je.
Eh bien le chef à bien fait de nous les servir. Les cuisses sont biens charnues, biens saisies, un goût de je ne sais pas quoi mais alors ce risotto, terriblement… parfait. Juste comme il faut, parfumé, fondant, le croquant de quelques amandes.
Un jus corsé était servi avec les cuisses dans un petit pot à part. Nous avons tellement apprécié le plat que nous en avons oublié le jus corsé… faudra revenir…
Pour le gamin c’est la pause, on lui fait gouter le risotto… juste quelques grains de riz!!!!
Pour les grands :
- Le ris de veau, croustillant à la citronnelle, jeunes blettes au citron confit, jus de veau réduit
Vous vous souvenez des gratins de blettes de la cantine scolaire. Si,si, le truc où on ne mangeait que le dessus et personne ne touchait les trucs insipides qui baignaient dans la flotte en dessous Là rien à voir, ça a du goût. Légèrement citronné.
Le ris de veau est enrobé d’une croute très fine, croustillante, saveur subtile de citronnelle, en finesse. Mariage parfait avec le jus de veau réduit.
Plat du gamin :
- La dorade rose, farcie au basilic, nougat de tomates, sauce vin blanc à l’huile des Baux
Je n’ai pas grand chose à vous dire, pas eu le temps de gouter au nougat de tomate qui pourtant m’intrigue. Notre bonhomme laissera juste une part de dorade pas perdue pour tout le monde, fondante, sauce excellente.
Affinés comme il faut. Pour MaDame, un fromage corse de brebis, un chèvre, un fromage italien, pas retenu les noms. Pour Monsieur, du classique mais bien fait, époisses, langres. Pour le Gamin, crottin de Gironde, un chèvre et un roquefort qu’il a tenu à nous faire gouter tellement il était bon!!!
Crème de mascarpone, crumble d’amande, gelée de citron.
D’abord c’est beau :
Ensuite la crème de mascarpone est légère, mousseuse, le crumble d’amande est croquant, léger lui aussi, pas trop sucré, et la gelée de citron est parfaitement équilibré entre l’acidité et le sucré. C’est vif, c’est une parfaite transition pour la suite.
Il arrive souvent que les desserts ne soient pas à la hauteur des plats les précédant.
Ici ce n’est pas le cas. Nos desserts arrivent… on reste bouche bée.
Je ne suis pas très dessert. Entre fromage et dessert je suis plutôt fromage. Entre sucré et salé, je suis salé.
Mais quand je vois un dessert comme celui là je devient tout d’un coup dessert !!!!Et je ne le regrette pas !!!
Le moelleux est moelleux, les fraises sont parfumées, et le sorbet bonbon à un goût de fraise tagada, on croirait en manger une !!!
N’oublions pas le dessert du fiston :
- La rhubarbe, pochée, émulsion à l’orange, la cuisson givrée et sorbet yaourt
Alors là c’est osé, de la rhubarbe en dessert pour un enfant, le chef ne joue pas la facilité et il a raison, c’est un succès.
On a eu juste le droit de gouter un bâton de rhubarbe chacun et une cuillère de cette émulsion givrée à la rhubarbe délicieuse. Le reste est parti directement dans l’estomac de la progéniture !!!!
Un dessert comme celui-là c’est une fin en apothéose. C’est sans compter sur les mignardises qui accompagneront le café, les voilà :
Dans l’ordre : financier citron, macaron citron, pâte de fruit ananas.
Je me répète, je ne suis pas sucré du tout, mais alors une pâte de fruit avec le goût du fruit comme celle-là ça passe tout seul, le macaron au citron est fondant, le financier moelleux. Fin en apothéose.
J’avais évoqué quelques lignes plus haut le vin, un Pessac-Léognon Latour-Martillac blanc dont j’ai oublié l’année. Effectivement ce vin qui en première dégustation est vif avec un goût en bouche incroyable de pêche, devient plus rond avec les cuisses de grenouilles et le risotto d’ail et persil, encore une autre saveur que je ne saurais décrire avec le riz de veau, excellent avec des fromages pourtant forts, et parfait avec le dessert. Bref cette bouteille a accompagné parfaitement tout notre repas.
Parfait. On se sent à l’aise. Souriant, efficace.
Il a pris le temps de discuter avec nous, de poser pour quelques photos, nous faire visiter les cuisines. Très bon souvenir… trop court!
En fait en fin de service tout est rangé, c’est calme, propre et j’aurai aimé être une petite souris (quoique dans une cuisine comme celle-là elle ne risque pas de vivre longtemps!!!) pour suivre une partie du service et découvrir les secrets du magicien.
Et si c’était à refaire : les yeux fermés. C’est le restaurant qui fait regretter d’habiter si loin de Bordeaux.
Interview de François Adamski lors des Epicuriales 2011 par BordeauxTV
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Le Gabriel c’est là
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D’autres avis sur Le Gabriel sur
Mercotte
31 août 2010 à 19 h 07 min
Superbe repas, ça donne envie de faire le voyage !
seti2m
5 décembre 2010 à 8 h 57 min
Un excellent restaurant en effet. Vous avez fait là de très jolies photos.
drancour
28 février 2012 à 22 h 56 min
toujours pas de deuxième étoiles, moins de presse et plus de travail en cuisine serai peut-être une bonne chose…
Gaëtan le gourmand
7 mars 2012 à 10 h 43 min
Égoïstement je serai assez tenté de dire « tant mieux » s’il n’y a pas de deuxième étoile. Franchement le rapport cuisine/ambiance/prix est imbattable et une deuxième étoile viendrait sûrement changer ce délicat équilibre qui fait que l’on aime une table. Si j’oublie que je suis client il est par contre évident que je ne peux que souhaiter cette deuxième étoile pour l’homme, sa brigade et le personnel de salle.
Concernant le coté médiatique, je trouve qu’il en use sans en abuser, la restauration même gastronomique est un secteur concurrentiel, un chef moderne doit savoir se montrer. Les manifestations auxquelles il participe sont locales, souvent les jours de fermeture du Gabriel. Il n’est pas à l’autre bout du monde pour ouvrir son énième restaurant!
C’est vrai par contre qu’il est très impliqué dans les Bocuses d’Or. Particulièrement dans la mise en oeuvre de l’Académie Française des Bocuses d’Or qui aura la charge de soutenir le candidat qui représentera la France dans cette compétition internationale. Les pays nordiques nous taillent des croupières depuis quelques années, ils mettent gros en moyens humains, technique et financier et il était temps d’en faire autant.
Et quand le chef n’est pas en cuisine je pense que son second avec lequel il travaille depuis bien avant Bordeaux sait comment assurer. Je ne sens pas trop François Adamski s’entourer de gens pas capables, ça n’a pas l’air d’être le genre à laisser aller.
Après trouver qu’il y a un manque de travail en cuisine… Le chef fait sa cuisine selon son inspiration, sa technique, ses envies. A ce niveau c’est un peu un art. On aime ou n’aime pas un tableau et on ne demande pas au peintre de travailler plus, de mettre plus de couleur, de changer le format de son tableau? On prend ou on laisse ! Enfin, c’est mon humble avis.